En 1776, les premières machines à vapeur de James Watt sont utilisées dans l'industrie textile au Royaume-Uni. S'en suit alors une série d'innovations techniques qui touchent majoritairement l'industrie ayant des répercussions sur l'ensemble de la société. Après la Seconde Guerre Mondiale, la France est assise au rang des vainqueurs, mais une grande partie du pays a pleinement subi les ravages du conflit. En 1945, le pays est à reconstruire. Les aides de l’État et l'application massive de nouvelles méthodes de travail vont permettre à la société française de connaître une période de croissance historique.
I/ L'ESSOR ÉCONOMIQUE
1. UNE NOUVELLE MÉTHODE DE PRODUCTION
A. LE FORDISME
Le fordisme est une nouvelle technique de production, créée par Henry Ford au début du XXème siècle. Elle s'inspire des théories de l’ingénieur américain, Frederick Taylor. Selon Ford, les pièces doivent être standardisées au maximum pour permettre une production de masse. Le travail est divisé en deux grandes phases de production qui elles-mêmes sont divisées en une multitude de tâches simplifiées. C'est un travail répétitif et chronométré. Ce mode de production est plus souvent désigné par l’appellation de "travail à la chaîne".
B. LE CERCLE VERTUEUX DE LA CROISSANCE
Le fordisme génère une production de masse, production que l’on cherche à maximiser. En effet, produire ainsi diminue le coût marginal et entraîne une augmentation des bénéfices de l’entreprise.
De plus, lors de chaque fin de mois, l'argent acquis doit être réparti. Une part est distribuée aux actionnaires. Une deuxième part est restituée aux banques, si l'entreprise a souscrit des emprunts. Une troisième part est mise "en réserve", c'est ce que l'on appelle l'autofinancement. Enfin, le reste est reversé aux employés sous forme d’augmentation des salaires. Si cette hausse est suffisamment importante, l’ouvrier pourra ainsi s’acheter la marchandise de l’usine. L’entreprise doit alors produire encore plus pour satisfaire cette nouvelle demande.
LE CERCLE VERTUEUX DE LA CROISSANCE
Ce cercle vertueux est à l'origine de la croissance et des progrès techniques qui en découlent.
Documentaire sur le fordisme diffusé sur Planète
Cette vidéo montre les nouvelles méthodes de travail imposées par Ford. Son usine est à la pointe de la technologie de l'époque. L’ouvrier est intégré à la chaîne et devient le rouage d'une immense machine où il doit suivre un rythme soutenu et imposé par une cadence élevée. Ces nouvelles méthodes permettent une production de masse avec des coûts de production relativement faibles. Bien que cet extrait relate une véritable aventure humaine du début du XXéme siècle, il est parfaitement rattaché au cadre des Trente Glorieuses. En effet, c'est l'application massive des méthodes de Ford qui vont permettre la folle croissance d'après-guerre.
2. UNE CROISSANCE ÉCONOMIQUE SANS PRÉCÉDENT
FORD ET SES NOUVELLES TECHNIQUES DE PRODUCTION
Documentaire sur le fordisme diffusé sur Planète
2. UNE CROISSANCE ÉCONOMIQUE SANS PRÉCÉDENT
Ces nouvelles méthodes de travail et les aides publiques entraînent une hausse de la
richesse produite : le PIB augmente.
On constate que le PIB connaît une hausse importante durant les Trente Glorieuses. En effet, il a été multiplié par près de 3,6 en quatorze ans. Cette hausse est due à la folle croissance de 5% par an, en moyenne. Ainsi, les marchandises produites sont plus nombreuses, car les individus consomment davantage.
Cette forte hausse s’estompe lors de l'année 1973, date à laquelle le premier choc pétrolier ébranle le monde entier.
On constate que le PIB connaît une hausse importante durant les Trente Glorieuses. En effet, il a été multiplié par près de 3,6 en quatorze ans. Cette hausse est due à la folle croissance de 5% par an, en moyenne. Ainsi, les marchandises produites sont plus nombreuses, car les individus consomment davantage.
Cette forte hausse s’estompe lors de l'année 1973, date à laquelle le premier choc pétrolier ébranle le monde entier.
II/ L'ESSOR SOCIAL
1. LA HAUSSE DU NIVEAU DE VIE
Niveau de vie : Le niveau de vie est égal au revenu disponible du ménage divisé par le nombre d'unités de consommation. Le niveau de vie est donc le même pour tous les individus d'un même ménage (INSEE).
En termes
plus simples, il correspond à la richesse et la prospérité d’une population. Il
se calcule par la qualité et la quantité de biens et services dont
cette population dispose tels que les revenus, les prestations sociales, la santé, l'enseignement,
l'environnement, la mortalité, l'espérance de vie, etc.
A. RÉUSSIR ÉCONOMIQUEMENT POUR RÉUSSIR SOCIALEMENT
Durant les Trente Glorieuses, le niveau de vie des Français croît de manière exponentielle.
Le cercle vertueux de la croissance et la hausse de la productivité permettent une augmentation des recettes des entreprises. Ainsi, les salaires augmentent grâce une meilleure répartition des richesses. De plus, la présence de plus en plus ubiquitaire de l’Etat-providence favorise encore plus cette répartition des richesses par le biais des revenus de transfert. L’adoption de plusieurs lois sociales améliorent également les conditions de travail des salariés. On peut ainsi citer le SMIG (Salaire Minimum Interprofessionnel Garanti, qui deviendra plus tard le Salaire Minimum Interprofessionnel de Croissance, le SMIC) voté en 1950. Mais aussi les congés payés, avec une troisième semaine en 1956 et une quatrième en 1969.
La hausse des revenus permet ainsi une hausse du pouvoir d’achat. Les Français peuvent donc dépenser plus d’argent, notamment grâce à un taux d’inflation modéré. Les congés payés instaurent aussi un nouveau poste de dépenses jusqu’alors très peu répandu: les loisirs. Les dépenses qui leurs sont consacrés connaissent une hausse de 50% entre 1950 et 1975.
Ainsi, avec des revenus qui augmentent plus rapidement que les prix, les Français consomment davantage et peuvent acheter de nouveaux biens tels que l’électroménager ou encore l’automobile.
On constate que le taux d’équipement des ménages est très faible en 1955: moins de deux Français sur cent dispose d’une télévision. Cela est dû au fait que les Français ne ressentent pas le besoin de posséder ces biens. De plus, leurs revenus assez faibles ne leur permettent pas de s’offrir de tels équipements "superflus". En revanche, pendant près de dix ans, le taux d’équipement des ménages augmente sensiblement. Cette hausse s'explique par l’augmentation des salaires et l’usage à outrance de la publicité. En 1975, plus 90% des ménages possèdent un réfrigérateur, contre moins de 10% en 1955.
B. LE PROGRÈS SOCIAL
C’est dans cette conjecture favorable que de nombreux ménages accèdent à la propriété et la maison individuelle. Les progrès techniques et les différentes innovations, notamment dans le domaine de la santé et des communications, ont des répercutions directes sur la société. L'espérance de vie augmente et les conditions de vie s'améliorent.
Les Trente Glorieuses marquent un profond tournant dans la société. Les salaires élevés permettent un accès à des services toujours plus nombreux et plus performants. L’accès aux soins est garanti par la Sécurité Sociale, qui paye la plupart des frais médicaux. Tous ces nouveaux progrès sociaux permettent ainsi l’amélioration du niveau de vie de toutes les classes de la société.
Une affiche de la Sécurité Sociale en 1947 |
La Sécurité sociale a été créée en 1945 sur l'instigation du Conseil National de la Résistance.
Le progrès social est représenté par le très fort développement des classes moyennes. La maison individuelle, le réfrigérateur et l’automobile sont devenus le symbole de la réussite individuelle, de la réussite sociale.
2. LA NOUVELLE PLACE DES FEMMES
La croissance économique
des Trente Glorieuses et
la société de consommation déclenchent de profonds changements tel que l’affirmation du sexe féminin, militant de plus en plus pour son
émancipation.
En 1944, après la Seconde Guerre Mondiale, suite à leur engagement indubitable, infaillible et courageux au sein de la Résistance, le général de Gaulle décide d'accorder le droit de vote aux femmes. Ainsi, les femmes votent pour la première fois lors d'élections nationales en
1945. Mais elles ne s’arrêtent pas là. En effet, elles se lancent dans un combat de longue haleine
qui les mènera vers leur émancipation, combat qui perdure encore aujourd’hui.
A. LES FEMMES ET LA POLITIQUE
Malgré leur reconnaissance et leur
équité avec les hommes garantie par la loi, les femmes s’impliquent peu en
politique, dont le fonctionnement et le bouillonnement semblent les repousser. De plus,
les mœurs sont profondément ancrées dans une morale d’avant-guerre. Accorder son suffrage à une femme est inimaginable. Ainsi, leur faible implication et
le manque d’engouement de la part des deux sexes, les femmes restent pendant
longtemps exclues de la scène politique française
B. LA FEMME AU FOYER
En 1947, la plupart des femmes ne travaillent pas. La majorité sont des femmes au foyer s’occupant des tâches ménagères et des enfants. Avec en moyenne trois enfants à charge, la ménagère travaille près quatre-vingt-sept heures par semaine. De plus, l'eau courante n'est pas accessible dans chaque foyer. La maison accapare la plus grande partie du temps dont elles disposent.
Les femmes sont intégralement sous la coupe de leur mari. En effet, elles sont dans l'obligation de leur demander leur autorisation pour travailler, et ce jusqu’en 1965. «Elles n’étaient pas en mesure de planifier leur avenir, de disposer de leur existence » *
C. LE COMBAT VERS L’ÉMANCIPATION
Fondé en 1956, le planning familial est un premier grand pas vers l’indépendance depuis le droit de vote en 1944. Cette association a pour objectif de préparer «l’opinion à une morale de la respectabilité des femmes dans la maîtrise de leur fécondité»*. Cette "respectabilité" a abouti à l’autorisation de mise sur le marché de la pilule contraceptive, en 1967.
Une affiche de soutient pour le planning familial |
Le combat pour l’émancipation se poursuit. En 1970, Simone de Beauvoir crée le M.L.F (Mouvement de Libération des Femmes) avec d'autres intellectuelles de l'époque. Ce mouvement va alors déclencher le plus grand engouement féministe en France. En 1975, sont adoptées avec beaucoup de résistance les lois Veil sur l'avortement
D. MIXITÉ ET PARITÉ
Dans les années 1960, on note un fort accroissement du nombre de femmes sur le marché du travail. Cela s’explique par une nécessité de subvenir à l’attrait et aux exigences de la société de consommation. Il faut monter dans l’échelle sociale pour voir ses revenus augmenter. Le travail féminin constitue une réponse à ce problème, apportant ainsi un nouveau salaire. Les revenus du ménage augmentent, ce qui lui permet de consommer davantage. Mais le travail des femmes n’est pas dû uniquement à l’attrait financier. En effet, cette "révolution" commence tout d’abord par l’éducation.
Durant les Trente Glorieuses, la mixité dans l'éducation s'accroît. Ainsi, en 1967, les filles deviennent aussi nombreuses que les garçons à décrocher leur baccalauréat. L’année 1970 marque un tournant: on note plus de filles que de garçons admis au baccalauréat. Les étudiantes deviennent plus nombreuses que les étudiants. Les femmes se dirigent majoritairement vers le secteur tertiaire, un secteur en pleine expansion, qui offre de plus en plus d’emplois de niveau moyen et supérieur. Les secteurs en plus forte croissance sont ceux de l’assurance, du tourisme, de la banque et de l’enseignement.
E. LA FEMME ET ÉLECTROMÉNAGER
L’apparition et la très large
diffusion de l’électroménager permettent à la ménagère de voir son travail
considérablement réduit. En 1947, laver le linge nécessitait plus de quatre heures de travail quotidien pour une famille de trois enfants. Beaucoup de foyers n’avaient pas accès l’eau courante. La mise en place d’un réseau
d’adduction d’eau révolutionne totalement la manière de
vivre : on ne doit plus se déplacer pour aller chercher de l’eau. L’arrivée du gaz permet aussi de bénéficier de l'eau chaude par le biais du chauffe-eau. L’apparition de la machine à laver est saluée par les femmes qui voient
leur tâche de travail considérablement réduite. L'aspirateur ou le réfrigérateur sont aussi des biens appréciés par les ménagères.
Ainsi, le taux d’équipement des ménages en téléviseurs, réfrigérateurs ou machine à laver passe de 10% en 1954 à 90% en 1970. « La date la plus importante de la vie parisienne n’était pas le salon de l’Auto, mais celui des Arts ménagers » *.
Ainsi, le taux d’équipement des ménages en téléviseurs, réfrigérateurs ou machine à laver passe de 10% en 1954 à 90% en 1970. « La date la plus importante de la vie parisienne n’était pas le salon de l’Auto, mais celui des Arts ménagers » *.
* : Les citations entre guillemets sont d’Evelyne Sullerot pour Nicholas Domenach, Travail, famille pilule : la révolution des femmes, L'Histoire, n°192, 1995
3. LA TRANSFORMATION DES MODES DE VIE
De fil en aiguille, et durant une trentaine d’années, la société française a été totalement bouleversée. L’agriculture traditionnelle disparaît au profit d'une agriculture de masse performante, permettant des rendements élevés. La production industrielle se voit pousser à son paroxysme durant les Trente Glorieuses. En revanche, le secteur tertiaire est devenu prépondérant.
On constate que la
répartition des individus dans la société française au sein des différents
secteurs d'activité n’est pas restée identique durant cette nouvelle ère. En effet, en 1962,
l’agriculture est encore un secteur important avec 20% de la population active travaillant dans ce secteur. Ceci est un héritage de la France agricole
telle qu’elle existait depuis le Moyen-Age. On constate qu’au cours de
moins de quinze années, la proportion
d’actifs dans l’agriculture est divisée par deux: c’est un tournant
majoritaire pour la société française. Cette baisse s'explique par la modernisation et la montée
du secteur tertiaire.
C’est ce dernier qui capte ce flux de main-d’œuvre
issu de l'agriculture.
On constate alors la forte croissance du désormais prépondérant secteur tertiaire entre 1962 et 1975. La proportion d'actifs dans ce dernier augmente de près de 15 points sur cette période. Quant au secteur secondaire, celui de l’industrie, on constate que la proportion d'actifs, travaillant dans cette branche, stagne à 30%. L’industrie française atteint alors son paroxysme.
En ce qui concerne le secteur de la construction, la part d'actifs français tourne autour de 9%, et ce malgré une légère baise en 1975 suite à la fin de la reconstruction, à la demande moins forte de logements et au premier choc pétrolier.
On constate alors la forte croissance du désormais prépondérant secteur tertiaire entre 1962 et 1975. La proportion d'actifs dans ce dernier augmente de près de 15 points sur cette période. Quant au secteur secondaire, celui de l’industrie, on constate que la proportion d'actifs, travaillant dans cette branche, stagne à 30%. L’industrie française atteint alors son paroxysme.
En ce qui concerne le secteur de la construction, la part d'actifs français tourne autour de 9%, et ce malgré une légère baise en 1975 suite à la fin de la reconstruction, à la demande moins forte de logements et au premier choc pétrolier.
Mais ces changements ne se limitent pas aux différents secteurs économiques. Ils touchent aussi l’ensemble de la société. Chaque individu voit son niveau de vie augmenter. La hausse des salaires permet aux Français de découvrir des activités auxquelles ils n’ont encore jamais eu accès tels que les loisirs ou l'automobile. La place de la femme s’affirme et elle est reconnue comme un Homme à part entière. En somme, se sont toutes les mentalités, tous les us, toutes les coutumes qui sont bouleversés. Le Français des Trente Glorieuses n’a plus les mêmes ambitions, les mêmes objectifs que le français d’avant-guerre. Ce sont les mœurs, telles qu’elles existent depuis l’Antiquité, qui changent et bouleversent les traditions.